Pour faire la guinche, rien de mieux qu'un disc jockey maison. Grandes et petites galettes vinyliques fournirent rapidement à la jeunesse dévergondée les moyens de danser en costard cravate et jupe serrée.
Ah ! jeunesse captive au marquettage des plus cyniques...
Les multinationales envahirent les médias de leurs chevaux de Troie les plus torves. Parmi les firmes les plus perverses, certaines couplèrent la vente de leurs petites compiles vaguement gigotantes avec la présentation de leurs meilleurs produits en dos de pochettes. La Bonnèterie de Moreuil (dans la Somme) étaient de ces monstres planétaires usant de leur puissance financière pour contraindra leurs cibles fragiles et les enjoindre par des mises en situation favorable à acheter leurs daubes tricotées.
Rhabillée pour l'occasion en une marque sexy (Bomo, ça claque, ça gicle, ça mouille !) reprenant habilement les radicaux de son nom, la Bonnèterie de Moreuil acheta par l'entremise de Jean Berthier Publicité (rha le bâtard) des productions clé en main à divers éditeurs phonographiques d'alors (Auteuil, Wagram...) en petits paquets de 4 chansons.
Comme d'hab', des orchestres professionnels de seconde zone y reprenaient à leur fade sauce quelques unes des scies du moment, rejouées pour diminuer les rétributions aux interprètes originaux.
Comme d'hab', le sens de la fête se décline en une accroche visuelle où une jeune femme (parfois accompagnée d'autres puceaux) charme le chaland par des poses aguicheuses. Chez Bomo, la quiche aguiche par la guinche chaloupée, la trinque d'une coupe ou la glisse d'un saphir sur son pick up portatif, c'est selon l'humeur du photographe (Jean Ray, connu essentiellement pour ses Ekta pour Bomo).
Comme d'hab', un habillage conceptuel dessinait un cadre moderne à ces livraisons : Discothèque Bomo (le côté collection pro, dont chaque opuscule est numéroté comme il se doit pour être ensuite classé dans les étagères juvéniles), Boum Bomo (la fête, la jeunesse, et l'allitération sonore du slogan qui claque), tous les succès du "HIT PARADE" pour faire up to date. Et tous ces mots si anodins mais qui résonnent dans les cortex post-pubères comme autant de sonnettes pavloviennes, les faisant saliver d'avance du panard qu'ils ne manqueront pas de prendre.
Le panard, c'est le cas. Bomo, roi mondial de la chaussette et de la jarrette, établit alors son coup de maître, qui assit sa supériorité marketing sur tous les autres nouveaux mécènes des arts émergents. Ce blitz krieg commercial dépasse l'habituelle réclame qui se réduit généralement à ne citer que son nom sur la pochette ou à offrir ces disques comme cadeaux promotionnels pour l'achat de 3 paires de chaussettes jersey.
Non, Bomo frappe un double grand coup (au porte-monnaie) : comme ses grands frères de La redoute, Bomo ne diffuse pas gratos mais fait payer son catalogue de produit à ses clients, alors même qu'ils vont à nouveau se délester de quelques Nouveaux Francs pour des cardigans violets (rrrrrrr). Car ces coquins tisserands picards présentaient à chaque livraison de leurs Boum Bomo que venaient d'acheter les pauvres bambins 4 de leurs produits au dos des pochettes, escomptant des actes d'achats compulsifs supplémentaires.
Les salauds !
Les filous !
Comment vouliez vous résister devant de telles offres de produits de qualité à portée de bourses, alors que vous aviez déjà abattu toutes résistances à cette marque démoniaque dont vous vous délectiez de la musique de sauvage qu'elle larguait sur une jeunesse en pleins émois sensitifs d'un corps turgescent ?
Les sagouins !
Mais ça, évidemment, personne n'ose le dire.
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